PlanètePSG – Est-il vrai que vous avez failli signer au PSG en tant que joueur à la fin des années 70 ?
Philippe Bergeroo : Oui j'étais à Bordeaux à l'époque et Claude Bez voulait que j'aille à Paris. Mais j'étais jeune, 22 ans, et j'avais dit au président que je ne pensais pas être prêt pour jouer dans ce club. Je ne me sentais pas capable. Il me manquait de l'expérience. Et là, Bez me l'a fait payer et m'a dit qu'il s'en souviendrait. Et je suis parti en CFA. Heureusement, je suis parti à Lille ensuite, seul club qui me voulait à l'époque (rires).
PlanètePSG – Vous avez été en équipe de France en tant que 3eme gardien lors de l'Euro 1984 et la Coupe du monde 1986. Des expériences qui vous ont servi pour la suite ?
Philippe Bergeroo : Cette expérience m'a énormément servi même si je préfère retenir mon titre de champion d'Europe avec les Juniors. C'était compliqué en 1984 car après la finale, je n'ai pas pu toucher la coupe alors que j'avais passé 2 mois dans le groupe. Michel Hidalgo le matin de la finale nous a pris avec Albert Rust pour nous demander pardon de ne pas nous avoir fait jouer une minute. C'était vraiment une bonne personne. En 1986, Joël Bats me demandait de raconter des histoires de pêche, de chasse juste avant les matches pour le détendre (rires).
Au final, tout ça m'a énormément servi pour la Coupe du monde 1998 (Ndlr : Philippe Bergeroo était l'entraîneur des gardiens). J'étais très proche de mes gardiens de but. Aimé m'avait d'ailleurs demandé de prendre la décision entre Barthez et Lama pour le poste de numéro 1. J'ai pris la décision mais après, il faut leur dire (rires). Bernard avait un problème de genou donc j'ai pris Fabien, j'ai privilégié la jeunesse. Pour Bernard, cela a été très difficile à avaler car il avait fait un superbe Euro 1996. Et quand je suis allé voir Bernard, il m'a dit que j'avais pris la mauvaise décision. Je comprends son amertume, même si on lui avait proposé de jouer le 3e match de poule, chose qu'il a refusée.
PlanètePSG – Vous arrivez ensuite au PSG en tant qu'entraîneur des gardiens. Comment cela s'est-il passé ?
Philippe Bergeroo : Pendant la Coupe du monde 1998, Charles Biétry était toujours à l'entrainement des Bleus. Et il me demandait si ça m'intéressait de devenir adjoint de Giresse et entraîneur des gardiens. J'ai donné ma réponse à la fin du Mondial. J'avais besoin de changer d'air, je connaissais bien Giresse avec qui j'ai joué pendant 5 ans aux Girondins.
Avec Giresse, on commence bien en gagnant le Trophée des champions. Mais c'est après Haifa (Ndlr : élimination en Coupe des Coupes) que ça s'est mal passé. Je sentais que c'était chaud pour lui, lui me disait que je me trompais. Puis ils l'ont viré et ont fait venir le duo Jorge-Troch. Du jour au lendemain, j'ai été déchargé des gardiens et je devais prendre en charge les joueurs écartés par Artur Jorge. Pour moi, cela a été quelque part formateur de s'occuper d'eux. Il fallait leur remonter le moral, mais également le mien (rires). J'ai mal vécu cette période, l'équipe était en plus en grosse difficulté.
PlanètePSG – Est ensuite venu votre tour en mars 1999. Comment les dirigeants vous ont-ils convaincu de devenir l'entraîneur principal ?
Philippe Bergeroo : En fait, ils m'ont convoqué après le limogeage du duo Jorge-Troch et m'ont demandé ce que j'aurais fait si j'avais en charge l'équipe. Là, je leur dis qu'il faut jouer à 4 derrière au lieu de 5, mettre des joueurs rapides sur les côtés, remettre Okocha dans le milieu etc. Et le lendemain, je prenais l'équipe.
A la base, je ne voulais pas prendre la place des autres. C'était un challenge énorme, on était pratiquement relégables. Je devais prendre rapidement ma décision. Donc j'ai appelé certaines personnes, mes amis m'ont dit que j'étais fou. J'ai eu Aimé Jacquet, lui m'a dit de foncer. Et donc j'ai pris l'équipe le lendemain et on avait la pression car on avait un match important. Ma priorité, c'était de les ménager physiquement et de faire des jeux plutôt ludiques. Et au final, ça a fonctionné puisqu'on a gagné à Auxerre (0-1, voir ci-dessous).
PlanètePSG – Vous réussissez à maintenir l'équipe et tous les supporters ont ce souvenir du match contre l'OM en mai 1999. Racontez-nous.
Philippe Bergeroo : Ce match, je m'en souviendrais toute ma vie ! On perdait à la mi-temps et en face, Rolland Courbis ne faisait entrer que des défenseurs alors que moi je n'utilisais que des offensifs (Ndlr : Okocha, J. Leroy, Rodriguez). Et le match bascule. Je garderai longtemps ce souvenir quand Rodriguez a marqué avec ce Parc qui se lève d'un coup. Plus de 20 ans après, j'en ai encore des frissons ! Ça faisait un bruit assourdissant, les spectateurs étaient tous debout. J'aurai ces images jusqu'à la fin de ma vie ! (voir vidéo ci-dessous)
PlanètePSG – Vous perdez ensuite contre Bordeaux (2-3), ce qui offre le titre aux Girondins aux dépens de l'OM. Beaucoup estiment que Paris n'a pas joué le jeu. Quel est votre avis ?
Philippe Bergeroo : Il y a eu une polémique d'une personne qui mettait la pression sur tout le monde pendant plusieurs semaines et que je ne citerai pas, il se reconnaîtra. On tient en plus le nul jusque dans les dernières minutes et les gens continuent quand même de parler de ce match. Concernant Llacer (Ndlr : qui avait déclaré ne pas avoir joué à fond), il ressentait sans doute de l'amertume car il n'a pas resigné au club donc ceci explique peut-être aussi son entrée.