Que porter, et qu'apporter au Parc des Princes ?
Le jour d'une rencontre au Parc des Princes, vous vous poserez d'autres questions d'une grande portée philosophique. Les supporters sont en effet soumis à des dilemmes que Corneille n'aurait pas reniés, si seulement il avait eu la chance de connaître le Paris Saint-Germain. Au lieu de perdre du temps à écrire Le Cid, se mettant ainsi à dos des générations de lycéens, il aurait pu répondre à de vrais problèmes existentiels : « Devez-vous mettre une doudoune ou bien un imperméable pour aller au Parc ? », ou encore « Que faut-il apporter à manger pour la mi-temps ? », sans oublier le mystère le plus profond « Qu'est-ce que c'est que cette histoire de bouchons d'eau minérale ? »
Sur certains points, tous les supporters se ressemblent. C'est au moment de claquer la porte, et donc déjà en retard sur le planning muri à l'avance que l'on se rend compte que l'on n'a rien prévu pour s'habiller. Or si vous partez attifé n'importe comment, vous risquez de passer une soirée détestable. Ne négligez donc pas votre tenue...
En été
Pour les premiers matches de la saison, vous ne pourrez pas vous tromper : un sweat, le maillot du club, une écharpe, les lunettes de soleil et la casquette si vous aimez cela, vite fait, bien fait, vous êtes déjà dehors. Le soleil encore présent vous réchauffera avant le début de la rencontre, et le Parc des Princes se refermant au-dessus des tribunes, il vous préservera des premiers frimas durant la partie. Puis, une fois le match terminé, vous vous réchaufferez en repartant chez vous.
Ne nourrissez donc aucune inquiétude pour les rencontres estivales, et n'écoutez pas votre mère qui vous conseille d'emporter vos gants de ski et votre cagoule en plein mois d'aout. Partez maillot sur le dos et les mains dans les poches, cela ira très bien.
En demi-saison
Là, les choses commencent à se gâter. Vous quittez votre domicile en milieu d'après-midi, en plein soleil de septembre, le cœur léger et le maillot rouge et bleu sur les épaules. Durant le trajet, la chaleur animale des transports en commun vous maintient dans une douce torpeur, en même temps qu'elle parfume délicatement vos habits, senteur « dessous de bras ». À ne surtout pas confondre avec les bombes désodorisantes fraîcheur « de sous-bois », inexplicablement peu usitées dans le métro.
Mais une fois sorti de la station, léger problème : du soleil il n'y a plus aucune trace ! En revanche la pluie et le froid ont fait leur apparition. C'est gênant, tout d'abord parce que le ballon va fuser, et que les appels en profondeur des attaquants parisiens seront plus délicats à gérer, mais aussi parce qu'avec votre petit pull et vos Ray-Ban à la Matrix, vous n'aurez pas l'air très malin. À faire le pied de grue au bas de l'escalier de la sortie de la ligne 10, profitant du dernier abri sec avant le Parc, pour guetter la fin de l'averse, tout ce que vous risquez, c'est de déclencher les remarques hostiles des habitants du XVIe. « Dis Maman, il fait la manche le Monsieur qui reste là avec sa casquette PSG ? Dis-donc, il sent un peu les dessous de bois lui, non ? ».
Alors même si la météo prévoit beau temps, même si en partant de chez vous il fait encore chaud, n'oubliez pas que les matches se terminent vers vingt-deux heures. Fin septembre, à cette heure-là, il fait généralement frais... Voire frais et humide. Prévoyez un petit imperméable léger, ça suffira. Une fois au Parc, même s'il s'est mis à pleuvoir, vous pourrez le rouler en boule, et le reprendre en partant.
En plein hiver
Lors des grands froids, la situation se complique encore. Rares sont ceux qui se font piéger par le relatif beau temps des après-midis de janvier, mais cela n'empêche pas certains supporters de commettre quelques erreurs de débutants.
La première concerne l'écharpe et les gants. Il faut au moins une écharpe pour aller au Parc, histoire d'être capable de l'exhiber fièrement en début de match, lors de ce que l'on appelle un « tendu ». À l'intérieur du stade en revanche, ne portez jamais de gants, malheureux. Même siglés au nom du club, ce genre de détail vous classe directement dans la catégorie des spectateurs non supporters. Comment voulez-vous taper bruyamment dans vos mains avec des gants ? Il n'en sort qu'un son étouffé, qui ne réveillerait même pas Albert de Monaco. Et pourtant il a le sommeil léger, ce qui explique l'interdiction absolue de chanter au stade Louis II : ça lui trouble le sommeil sur son beau transat, et après il digère mal. Mais ici, vous n'êtes pas sur le Rocher : vous êtes là pour faire du bruit. Alors pas de gants au Parc.
Vous vous réchaufferez les mains en rythmant les chants parisiens de vos applaudissements. Pas d'inquiétude, la masse de supporters tempère l'intérieur du stade, et la chaleur corporelle se voit retenue grâce au plafond légèrement vouté. Il est rare d'avoir vraiment froid au Parc, à part pour quelques rencontres de coupes. Joués une fois que la fraîcheur est bien apparue, vers 21 heures, télévision oblige, ces matches se déroulent généralement début janvier, lorsque les jours sont bien courts. Comme en plus ce type de rencontres n'intéresse pas beaucoup de monde, il y a de fortes chances pour que vous n'ayez pas moult voisins contre lesquels vous réchauffer. Dommage.
Mais à part ces cas extrêmes, vous risquez davantage d'attraper froid avant la rencontre qu'à l'intérieur du stade. Battre le pavé une bière à la main, au cœur des frimas, même en discutant de football, cela peut rapidement se montrer néfaste pour la santé. Alors prévoyez des vêtements bien chauds, une paire de gants... que vous rangerez avant de gagner votre siège, et, détail subtil, une seconde écharpe ! Celles vendues par le club prouvent que le service merchandising mérite bien son nom : à part monnayer des merdes et des chandails, point de salut pour eux. Les écharpes officielles, en polyester, ne protègent jamais d'aucun coup de vent. À croire qu'elles ont été conçues dans cet unique but par une équipe de chercheurs de la Nasa. Alors, si vous avez la gorge fragile, emportez-en une autre, bien chaude celle-là, histoire que vos amis puissent encore entendre le son mélodieux de votre voix le lendemain, et gardez la rouge et bleue pour les tendus d'écharpes.
Faites également attention à ne surtout pas commettre l'erreur ultime, sous peine de vous voir attaqué en justice par deux « grands » noms du football français : venir avec une couverture au Parc est totalement prohibé ! Seuls Guy Roux et Loulou Nicollin ont le droit protéger leurs petites guiboles ainsi. C'est écrit dans la charte de bonne conduite de la Ligue de Football Professionnel, signée en début d'année par les capitaines et les entraîneurs. Il y a bien d'autres choses qu'il est interdit d'apporter, pour des raisons de sécurité cette fois. Les stupéfiants, même si on ne s'en rend parfois pas vraiment compte, l'alcool, ainsi que les barres à mines, crans d'arrêt, et autres pistolets mitrailleurs, même de fabrication française, sont tous prohibés.
Cela vous paraît logique ? À voir ce qu'apportent certaines personnes, ça ne l'est pas pour tout le monde. Si les stewards trouvent relativement peu de Famas lors de la fouille au corps que tout le monde subit avant de rentrer dans sa tribune, il n'est pas rare qu'ils mettent la main sur des couteaux. Oh, pas des lames modèle Rambo, plutôt de petits couteaux de cuisine, apportés par des étourdis en vue d'étaler du pâté de volaille sur les baguettes qu'ils transportent dans des cantinières. Le Parc, c'est un peu comme les vols d'American Airlines, il faut savoir peler les pommes à mains nues. On imagine aisément pourquoi...
En revanche, ce qui trouble beaucoup les nouveaux venus, c'est l'histoire des bouchons de bouteilles d'eau minérale. Si vous souhaitez rentrer avec un pack entier de bouteilles d'eau de source, et tel l'entraîneur bourguignon, disputer le premier qui boit en s'en mettant plein le menton, libre à vous. Mais sans bouchon.
Et oui, il est interdit de pénétrer dans l'enceinte du Parc des Princes avec une bouteille bouchée. Les gens râlent, trépignent, les pauvres gars chargés de la fouille haussent les épaules... Le règlement c'est le règlement ! Les choses rentrent vite dans l'ordre : les stewards ne cédant jamais, il faut bien que les supporters s'exécutent, et jettent leurs bouchons dans la poubelle prévue à cet effet s'ils veulent assister à la rencontre.
Avantage inattendu, cette petite aventure offre un inépuisable sujet de conversation à ses héros malheureux : pourquoi ôter les bouchons mais laisser rentrer les bouteilles ? Le chef de la sécurité du Parc fait-il partie d'un mouvement politique contre le PVC ? Les membres du merchandising essayent-ils de recycler les bouchons pour en faire des écharpes ? L'architecte du Parc tente-t-il de vous forcer à renverser quelques gouttes d'eau afin d'arroser le béton pour le conserver à la bonne température ? Rien de tout cela. La vérité est à la fois bien plus simple, et assez triste : une bouteille pleine est un projectile d'un kilo et demi, et donc très dangereux. Sauf que sans bouchon, une fois en l'air elle se videra dans le cou de tous les supporters placés en contrebas. Sans danger pour le club, mais pas pour vous, surtout en hiver, les gens appréciant modérément d'être arrosés par une température proche de zéro.
À part cela, il n'y a plus vraiment de mauvaises surprises à attendre de la fouille. Vous pouvez toujours tomber sur l'agent de sécurité opiniâtre, qui retourne la tranche de jambon de votre sandwich pour vérifier que vous n'avez pas caché de grenade à main en dessous, mais c'est rare. Il est à noter que plus le prix des places baisse, et plus la fouille est poussée. Il arrive que suivant l'inspiration du moment, les boucles de ceinture jugées trop grosses soient interdites dans les virages. Dans ce cas, vous suivrez la rencontre en applaudissant de la main droite, la gauche maintenant votre pantalon à hauteur de hanches. Un grand plaisir, surtout quand on sait qu'il faudra une demi-heure d'attente à la consigne pour remettre la main sur votre ceinture à la fin de la rencontre. Il y a quelques années, certains malchanceux se retrouvaient même en chaussettes, leurs chaussures coquées s'étant vues interdire l'entrée du Parc. Mais ces mésaventures commencent à dater...
En résumé, vos dilemmes devraient donc rapidement se régler. Faites preuve de sagesse, et n'oubliez pas les règles d'or : on peut toujours enlever une couche quand on a chaud, alors qu'une fois arrivé au Parc il est trop tard pour revenir chercher son blouson ; et tout objet dangereux sera détecté, ne faisant que vous retarder lors de la fouille... Dire qu'au lieu de tout ça, Corneille a préféré raconter qu'à vaincre sans péril on triomphe sans gloire ! Alors que tous les supporters Parisiens se seraient bien contentés d'une toute petite victoire sans péril contre Gueugnon en finale de la Coupe de la Ligue version 1999/2000...
Encore un dicton à la con, oui.