Un cap a été franchi dimanche dernier, à Nice. Première défaite à l'extérieur, et Paris devient relégable. La situation est grave. De l'extérieur, les avis fusent. Ils ont tous leur explication, leur solution miracle... Mais en attendant, samedi, en tribunes, on fait quoi ?
Supporter le club de la Capitale n'a jamais été chose simple. Même lorsque le Paris SG tutoyait les sommets, il fallait parfois affronter les critiques et les crises. Alors maintenant que les Rouge et Bleu se découvrent des vocations de spéléologues, et tiennent à tout prix à explorer chaque recoin des profondeurs du classement de L1, être fan du PSG confinerait presque au désagréable. Voire, osons le mot, à l'irritant.
Parce que là, malgré les objectifs plus que modestes annoncés par le président Cayzac, malgré tous les appels à l'indulgence interjetés par Paul Le Guen, avec cette dix-huitième place atteinte dimanche, les gouttes d'eau ne sont pas loin de faire déborder le vase... Jusque-là unis et conciliants, la plupart des supporters ressentent désormais un ras-le-bol qui n'augure rien de bon.
Le classement actuel a valeur d'électrochoc pour le petit monde du Paris Saint-Germain. On se cherche sur les forums, on compulse les médias, tout le monde semble désemparé, perdu. Parce que le sentiment qui prédomine chez beaucoup, c'est la sensation de tout avoir essayé.
On a vécu l'union sacrée, elle nous a sauvés en mai dernier... Mais dès aout, les joueurs nous ont tourné en live un remake de « Souviens-toi l'été dernier ». Remake qui s'est avéré être du même niveau que l'original, c'est-à-dire affligeant. Tout l'automne ensuite, les tribunes ont tenu bon, soutenant envers et contre tout leurs joueurs. Et pas besoin d'avoir subi une opération chirurgicale à trois milliards après un accident de parachute pour capter les légitimes grincements de dents que cela a provoqué. Il n'a pas toujours été facile de continuer à encourager cette équipe-là. Cela s'est souvent fait avec la boule au ventre et l'envie de tout envoyer paître. Mais les tribunes ont tenu bon. Tout ça pour quoi ? Pour voir le PSG devenir relégable fin novembre. Alors à quoi bon ?
Que faire quand on a déjà tout essayé ?
On ne peut pas continuer sur cette voie. On ne doit pas continuer ainsi, si cela doit amener le Paris SG toujours plus bas. Il faut donc agir. Oui, mais voilà, on fait quoi ?
Parce que même si on ne compte guère d'options possibles, le problème n'est pas si simple. L'idée première pour venir en aide aux joueurs du club consiste évidemment à organiser l'opération « un coup de pied dans ton cul » la plus magistrale possible. Juste histoire que l'inertie provoquée par 40 000 coups de pompes dans le train puisse provoquer chez onze gugusses un mouvement susceptible de durer tout un match. Histoire de les voir courir quatre-vingt-dix minutes, ce qui nous changerait un peu.
A part cela, quels sont les moyens de pression possibles ? On pourrait envisager la grève des encouragements, pendant une durée déterminée, voire tout un match. Cela a déjà été fait, mais dans des circonstances bien différentes. Car si les groupes des virages avaient choisi ce type d'action, c'était non pas pour se plaindre des résultats, mais bien pour défendre leur mode de fonctionnement, et montrer ce qu'il adviendrait si on privait le Parc de leur présence. Ce qui n'avait rien à voir avec une grève qui n'aurait pas d'autre but que de se plaindre des résultats de l'équipe.
Par le passé, ces matches passés sous silence représentaient une lutte. Là, cela ressemblerait surtout à un abandon de poste. Alors quoi, nous qui chantons match après match « où tu es nous sommes là, tu ne seras jamais seul », nous pourrions laisser notre club se dépêtrer tout seul, alors qu'il vit une crise aiguë ? Les supporters parisiens n'ont jamais laissé leurs joueurs dans la panade. Arrêter de les soutenir aujourd'hui, malgré toutes les excuses, d'ailleurs valables, serait indigne.
Car il s'agit de cela après tout : nos joueurs montrent qu'ils n'ont pas les ressources pour s'en sortir par eux-mêmes. Pas de révolte, pas de hargne, aucune haine de la défaite. En tant que supporters du Paris SG, impossible d'accepter cela avec le sourire compatissant d'un parent démissionnaire, bien entendu. Mais impossible aussi d'agir comme eux et de baisser les bras. Se taire, arrêter de chanter pour nos couleurs, ce serait nous mettre à leur niveau. Rester physiquement présents en tribune, mais inutiles, plantés sans rien faire consisterait à adopter pile le comportement qu'adoptent certains joueurs sur le pré.
Comment imiter ce que nous rejetons chez eux, et nous regarder dans la glace le lendemain ? Impossible.
Alors quoi ? Une opération tribunes vides ? Du style « Ils ne méritent pas que nous nous battions pour eux, alors nous ne le ferons pas » ?... Le message serait fort. Mais en dehors des difficultés logistique (comment empêcher untel d'accéder à son siège s'il le souhaite vraiment ?), un autre aspect ne doit pas être oublié : après tout, ce ne sont pas ces joueurs que nous supportons. Ils passeront, et quitteront le Parc. Nous, non. Et le club non plus. Après tout, c'est encore de cela qu'il s'agit : encourager le PSG ! Soutenir le club.
Là aussi, qui peut imaginer que nous laissions le club sans soutien, et assumer cela sans aucun remords par la suite ? Difficile...
Le linge sale s'est lavé en famille
Restent les « explications franches », en privé. Viriles, mais correctes. Autant il a parfois par le passé été difficile de justifier les agissements de certains, autant là, on comprend aisément ce qui a poussé les supporters indépendants croisés par les joueurs à l'aéroport de Nice à exposer fermement leur point de vue au groupe pro. Certes, personne n'a forcé ces parisiens à se taper huit cents kilomètres aller et huit cents kilomètres retour. Bien entendu, ils pouvaient tout aussi bien garder l'argent consacré à ce match, ou le dépenser en autant de bières bues devant un écran de télévision. On n'est pas obligé de supporter Paris...
Mais quand on le fait, et ces gars l'ont fait, toute la rencontre, alors ensuite, on est certainement en droit d'émettre son point de vue. Ce soir-là, le linge sale a été lavé. Ca ne s'est pas déroulé durant le match, au risque de nuire au club, ni même au stade, en public. Non, ce linge sale, ces supporters s'en sont chargé en famille. En privé. Et c'est très bien comme cela.
Chaque chose en son temps. Gageons que les mouvements, les différentes associations qui quelque part nous représentent tous au Parc des Princes ont su, et sauront mettre la pression avant la partie. Mais par la suite, une fois le coup d'envoi donné, si on ne souhaite pas passer pour des gars qui abandonnent quand la tâche est trop dure, on a beau le prendre par tous les bouts, il faudra bien chanter.
Ce qui nous unit
Chanter pour montrer que si nous nous permettons de faire des reproches à ces joueurs, c'est bien parce que depuis le début de la saison, nous en revanche sommes irréprochables. Samedi, il y aura des tensions parmi les supporters. La rage causée par ce sentiment d'exaspération est désormais trop grande. Pourtant, il faudra tout de même chanter, unis, pour Paris. Et parce que des fans qui se taisent n'ont plus de supporter que le nom. Bien sur que la haine et le sentiment d'être trahis nous habitent. Qui arrivera avant le match de samedi gai, et détendu ? Personne. Comment chanter quand on n'éprouve que colère, et écœurement ?
Peut-être en se servant justement de tout cela. Nous sommes liés à ce club. Chacun d'entre nous s'est par le passé lié au Paris Saint-Germain, d'une façon ou d'une autre. Et aujourd'hui ce lien nous pèse, comme un boulet. Il pèse du poids de la défaite, des humiliations et de la honte. Il nous tire tous vers le bas. Nous en sommes tous là, ensemble dans la même galère. Ne luttons pas les uns contre les autres. Retournons cette rage et cette frustration. Servons-nous en contre notre ennemi commun : la défaite. Servons-nous en pour combattre au côté de ce qui nous a unis : les couleurs de la Capitale.
La haine est là. La fureur est là, éparpillée en chacun de nous. Inutile de se cacher ou de se mentir. Sortons tout cela. Montrons tout cela ! Gueulons un bon coup. Puisque le terrain ne nous apporte aucune joie, alors autant aller la chercher en tribunes, et montrer ce pour quoi nous venons au Parc.
Il y a moyen de sortir quelque chose de beau de toute cette merde. Montrons leur que de Boulogne à Auteuil, nous au moins, en tribunes, ensemble nous sommes invincibles.