PSG70 : Guy Delhumeau, pouvez-vous nous expliquer le parcours par lequel vous arrivez au Paris Saint-Germain en 1971 ?
Guy Delhumeau : "J'ai fait mes débuts dans le petit club de Villiers, dans la banlieue de Poitiers. J'y ai joué en scolaire puis en juniors avant d'intégrer le Stade Poitevin voisin vers 16, 17 ans, un peu comme tous les jeunes footballeurs plutôt adroits de la région. A Poitiers, j'ai tout d'abord évolué avec l'équipe réserve, puis avec la première en division d'honneur, en Championnat de France Amateur puis en deuxième division. J'étais étudiant, ou plutôt lycéen. Je préparais le bac dans le but de devenir professeur d'éducation physique et sportive. Au départ, le foot, ce n'était qu'un loisir, et puis tout s'est enchaîné : j'ai joué en équipe de France amateur, puis j'ai été sélectionné pour les Jeux Olympiques de Mexico en 1968. A partir de là, je me suis fait repérer par plusieurs clubs professionnels tels que Nantes, Strasbourg, Valenciennes et quelques autres dont le PSG qui venait d'accéder à la première division. J'ai choisi Paris car je connaissais bien messieurs Patrelle et Crescent, les présidents. Le premier était dans l'encadrement de l'Equipe de France Amateur. C'est d'ailleurs lui qui est venu me voir, moi et d'autres joueurs de la sélection dont Daniel Horlaville pour nous proposer de venir avec lui à Paris. J'ai du arrêter mes études pour me consacrer entièrement au football mais j'ai tout de même été jusqu'au bac. Je suis arrivé en 1971 dans une bonne équipe de Paris avec un groupe qui vivait très bien. Il y avait beaucoup de bons joueurs comme "Tchouki" Djorkaeff, Jean-Pierre Destrumelle, Roland Mitoraj, Jean-Claude Bras mais aussi Michel Prost."
PSG70 : Pourtant, malgré un bon groupe, vous terminez cette saison-là à la 12ème place.
G.D. : "Oui, ce n'est pas évident. Tout est plus compliqué à Paris. Aujourd'hui, c'est un peu différent, mais à l'époque, on jouait chaque match comme à l'extérieur. Lorsque nous recevions Reims, il y avait plus de Rémois que de Parisiens dans le stade, pareil pour les matches contre Rennes et Ajaccio où les Bretons et les Corses se déplaçaient en masse pour soutenir l'équipe adverse. Nous avons fait une saison correcte pour un club promu mais elle s'est terminée par la scission."
PSG70 : Justement, en fin de saison, le club est scindé en deux. Vous, ainsi que la majorité des joueurs pros, restez au club en première division avec le nouveau Paris FC. Le Paris SG, quant à lui, est rétrogradé en Division 3. Est-ce que cela changeait quelque chose pour vous ?
G.D. : "Nous n'étions plus basés à Saint-Germain-en-Laye mais nous allions nous entraîner à Vincennes, à Montreuil ou à Jean-Bouin. C'était très instable comme situation. D'ailleurs, je pense que tout ça a causé beaucoup de tort au Paris FC, et c'est en partie ce qui a provoqué sa perte."
"Il n'y a jamais eu de problèmes entre les parisiens et sangermanois sur le terrain"
PSG70 : Aujourd'hui, avec le recul, vous sentez vous ancien joueur du Paris Saint-Germain tel qu'il existe ou pensez vous au contraire que le PSG qui a recommencé en D3 en 1972 est un autre club ?
G.D. : "Oui, je me sens tout de même ancien joueur du PSG. Mon club de départ, celui dans lequel j'ai signé, c'était le Paris Saint-Germain. Mais en fin de saison, nous n'avions pas le choix, en tant que joueurs, nous étions sous contrat et obligés de faire notre travail sans nous préoccuper de tout ce qui se passait en interne. Les supporters de l'époque ont naturellement suivis le Paris FC en première division, c'était le club de la capitale, celui qui jouait au Parc des Princes avec le même groupe de joueurs."
PSG70 : Aviez-vous toujours un œil sur les résultats du Paris SG en Division 3 ?
G.D. : "Oui, bien sur, nous n'avons pas oublié le Paris Saint-Germain malgré tout. Certains d'entre nous ont fait le choix de repartir en D3 avec le PSG comme Camille Choquier. Nous étions toujours en relation. Mais vous savez, il n'y a jamais eu de problèmes entre les Parisiens et les Sangermanois sur le terrain. Tout ceci n'était qu'un problème dans la direction. Nous, joueurs, étions loin de tout ça."
PSG70 : Si vous ne deviez en retenir qu'un, quel serait le meilleur souvenir de votre carrière ?
G.D. : "Naturellement, les Jeux Olympiques de Mexico en 1968. C'est un peu le summum qu'un sportif puisse connaître dans une carrière. Au-delà d'une Coupe du Monde, les Jeux Olympiques permettent de rencontrer des athlètes de tous les sports, c'est vraiment un souvenir inoubliable même si je n'ai joué qu'une rencontre dans cette compétition. Je me suis blessé et nous nous sommes fait éliminer en quarts de finale. Je garde aussi un bon souvenir de notre victoire en Coupe de France des Ligues avec la sélection du Centre-Ouest. Mais, pour ce qui est du PSG, je n'ai jamais eu de problèmes avec qui que ce soit, et je garde globalement de bons souvenirs à tous les niveaux."
PSG70 : Et votre plus grand regret ?
G.D. : "Probablement de n'avoir jamais pu jouer une finale de Coupe de France. Pourtant, j'aurais pu, j'en ai presque eu l'occasion. A plusieurs reprises nous sommes tombés en quarts ou en demi-finale, mais jamais dans la dernière ligne droite."
PSG70 : Et concernant l'Equipe de France, ne regrettez-vous pas de ne jamais avoir été appelé en A malgré vos sélections en Amateurs et Olympiques ?
G.D. : "Oui, comme tout joueur professionnel, j'ai pu à un moment regretter de ne pas avoir été appelé en Bleu, mais ce n'était pas évident. C'était Georges Carnus le gardien titulaire, et puis Dominique Baratelli a naturellement pris sa succession. C'était un très grand gardien avec une volonté extraordinaire, que j'ai connu durant une saison à Nice, car j'étais sa doublure. Mais à l'époque, il y a eu pas mal de changements dans l'encadrement de l'Equipe de France. Stefan Kovacs a succédé à Georges Boulogne. A chaque fois, ce n'était pas évident de pouvoir s'imposer."
PSG70 : De tous les joueurs que vous avez côtoyé à Paris ou ailleurs, lequel vous a le plus impressionné, que ce soit sportivement ou humainement ?
G.D. : "Celui qui m'a le plus marqué sportivement mais aussi peut-être humainement, c'est "Tchouki" Djorkaeff. Un gars extraordinaire qui faisait son métier de façon passionnée. Il y a eu aussi Pierre-Albert Chapuisat au Paris FC. Bien que très caractériel, c'était quelqu'un de formidable aussi. Au niveau des dirigeants, je dirais Monsieur Patrelle qui m'a fait venir au PSG. J'avais une confiance absolue en lui."
PSG70 : Qu'avez-vous fait depuis votre fin de carrière ?
G.D. : "J'ai quitté le Paris FC en 1974 après deux saisons alors que le club était relégué en deuxième division. J'ai ensuite joué une saison à Boulogne-sur-Mer puis à Nice comme doublure de Dominique Baratelli. En 1976, j'avais 29 ans et je devais faire un choix. Je pouvais poursuivre ma carrière ou rentrer chez moi près de Poitiers et reprendre l'entreprise familiale de transport frigorifique. J'ai choisi cette deuxième solution. J'ai continué à jouer au foot, pour le plaisir avec l'équipe de Montmorillon jusqu'en 1979. J'ai arrêté lorsque nous sommes montés en D2 car je ne pouvais plus à ce niveau concilier mon travail et ma carrière. Dans les années 90, je suis retourné au Stade Poitevin comme Directeur Sportif alors que l'équipe était en deuxième division. J'avais sous mes ordres Denis Devaux, un ancien international français. J'ai du arrêter vers 1997. Depuis, je donne un coup de main au petit club du village dans lequel j'habite qui évolue en première division de district dans la banlieue de Poitiers."
PSG70 : Suivez-vous toujours les résultats du PSG ? Quel regard portez-vous sur la situation du club ?
G.D. : "Oui, je suis toujours le sport en général et plus précisément le football. J'ai bien entendu une petite préférence pour le PSG, mais à vrai dire, je ne suis pas très surpris par ce qui se passe en ce moment. C'est très difficile pour un joueur de s'imposer à Paris, déjà à mon époque. Beaucoup de joueurs n'y arrivent pas et sont totalement perdus lorsqu'ils arrivent dans la capitale. Lorsqu'on débarque à Paris, il y a des repères que l'on n'arrive pas à avoir par rapport à la province. Il n'y a pas le même environnement, les gens sont moins proches de vous, on n'a pas notre petit clocher pour ainsi dire."
PSG70 : Y a-t-il aujourd'hui pour vous la place pour un deuxième club parisien en Ligue 1 ?
G.D. : "Je pense que c'est aujourd'hui possible vu le niveau auquel le football est arrivé sur le plan financier. On pourrait faire comme en Angleterre et avoir deux ou trois clubs par ville en première division, mais je ne suis pas sur qu'il y ait la ferveur suffisante dans la région. Il faudrait tout d'abord un très bon club, ça serait déjà pas mal. On a pu voir que des clubs de banlieue comme Créteil ont pu tenter des choses ces dernières années, mais ça ne prend jamais."
Propos recueillis et retranscrits par Maxime Pousset pour PSG70.com et PlanetePSG.com. Merci à Guy Delhumeau pour sa disponibilité.