Il séduit les uns, il rend sceptique les autres. Mais une chose est sure, il ne laisse pas indifférent. Unai Emery est un entraîneur méconnu en France. Mais passé notamment par Valence et Séville, il jouit d'une belle réputation au-delà des Pyrénées. Portrait d'un entraîneur aux antipodes de son prédécesseur.
Ancien footballeur espagnol, Emery n'a pas vraiment et une carrière au plus haut niveau. Et rejoint donc la catégorie des entraîneurs n'ayant pas évolué dans des grands clubs, comme José Mourinho ou Arrigo Sacchi. Loin de la carrière de son père (gardien à la Corogne), le petit Unai a été un milieu de terrain formé à la Real Sociedad mais n'a jamais évolué avec l'équipe première. Il a ainsi accompli la plupart de sa carrière en deuxième et troisième division espagnoles. C'est à seulement 34 ans qu'il décide d'être entraîneur. Il débute par le club de Lorca (troisième division espagnole). Dès sa première saison, il fait monter le club en deuxième division et le maintient à une place honorable la saison suivante (5e). En 2006, il est appelé à entraîner Almeria. Là aussi, succès garanti dès son premier exercice puisqu'il fait monter le club de deuxième à première division.
Il découvre ainsi la Liga et permet à Almeria d'obtenir une huitième place inespérée en 2007-2008. De quoi donner des idées aux autres clubs espagnols. Et notamment à Valence, qui l'engage. Une première saison prometteuse (6e place) lui permet de voir plus loin. Avec le club valencian, il réussit à terminer au pied du podium les trois années suivantes et atteint les quarts de finale de la Ligue Europa en 2010 et les demies en 2012 (à chaque fois éliminé par l'Atlético, futur vainqueur).
Emery veut alors exporter ses talents de technicien et décide de partir au Spartak Moscou à l'été 2012. Choix pas vraiment concluant. L'entraîneur espagnol multiplie les mauvais résultats et finit par être limogé en novembre après un derby lourdement perdu contre le Dynamo Moscou (1-5). Il s'en est expliqué dans son livre « la mentalité de gagneur » : « Je voulais gagner en expérience. C'était un défi pour voir ce que j'étais capable de faire. Ça m'a rendu meilleur en tant qu'entraîneur et ça m'a aidé à mieux comprendre ce qu'est le football. Au début, c'était une bonne expérience, mais la base de l'équipe n'était pas assez solide. Et quand les mauvais résultats commencent à venir, l'adversité revenait toujours les hanter ».
Heureusement, il rebondit vite à Séville, qui l'engage en janvier 2013. Avec le club andalou, il acquiert une notoriété encore plus grande. Et remporte pas moins de trois Ligue Europa consécutives. Tout en finissant à des places honorables en Liga (5e en 2014 et 2015, 7e en 2016). Seul point noir, ses défaites en Supercoupe d'Europe, et, surtout, son parcours en Ligue des champions (3e derrière la Juventus et Manchester City). Mais son passage a marqué tout le monde dans la ville, au point qu'une vidéo hommage lui a été adressée en juin dernier.
Après Laurent Blanc, le PSG va peut-être enfin retrouver un entraîneur de haut niveau, après ce qu'il a connu du temps de Carlo Ancelotti (2012-2013). Unai Emery a ainsi déjà été critiqué par certains pseudo-spécialistes du football qui n'ont comme seul argument son parcours en C1 pour remettre en question ses compétences et déverser leur bile. Mais non, Emery est un travailleur réputé et renommé. Qui suscite les louanges de pas mal de ses joueurs. Ses méthodes sont diverses et variées, ce qui rend son travail passionnant pour lui-même mais, surtout, pour les joueurs qui sont sous son commandement : « Je connais la peur, cette sensation de ne pas vouloir décevoir et de finalement se louper. C'est parce que je connais ça que je sais qu'il faut une confiance maximale pour jouer au football. Pour moi, un entraîneur doit aussi faire office de thérapeute, pour soigner les douleurs qui ne se voient pas avec les yeux », a-t-il ainsi déclaré lors d'une interview intéressante à So Foot.
Le technicien basque a ainsi une philosophie simple : « C'est simple : il ne faut jamais penser à l'avenir ! Jamais ! Si on se projette trop loin, on n'y trouve que du doute. Moi, mon futur le plus lointain, c'est demain. C'est une sorte de routine mentale qu'il faut s'imposer pour ne pas devenir fou. Tu peux essayer de tout contrôler dans le football, mais au final, c'est lui qui te dictera toujours sa sentence (...) Moi, ce qui m'intéresse, ce ne sont pas les joueurs, mais les blocs, les collectifs. Ce que je regarde, ce sont les combinaisons de jeu, la manière de défendre et d'attaquer et comprendre pourquoi la présence d'un joueur rend son coéquipier meilleur ».
Emery axe beaucoup ses séances sur des montages vidéo interminables et un travail tactique minutieux. Il ne veut rien laisser au hasard : « Je souhaite apporter mes idées et ma personnalité, bâtir une équipe très agressive, avec beaucoup de personnalité, qui voudra toujours être actrice du jeu, pas seulement en cherchant à gagner, mais aussi en y mettant beaucoup d'énergie, avec un jeu auquel les fans pourront s'identifier. On va essayer d'apporter un petit plus, franchir un pas supplémentaire, faire en sorte que chaque joueur développe encore son potentiel. On va travailler l'agressivité, la position sur le terrain, le placement, la domination du jeu, que les joueurs aient vraiment la possibilité de développer leur jeu à travers le collectif. Il faut que l'équipe soit le socle, la base, avec de grandes individualités, mais toujours dans l'esprit d'équipe ».
Un discours qui en a séduit plus d'un. A commencer le vétéran Maxwell, qui en a pourtant vu d'autres : « Il a sa touche, son style mais c'est vrai que beaucoup d'exercices ressemblent à ce que je faisais à Barcelone, et même au Pays-Bas. C'est une philosophie de jeu un peu similaire. Cela concerne les jeux de passe, la vitesse qu'on doit y mettre, mais aussi comment orienter son corps pour bien recevoir le ballon sur le terrain. Il aime beaucoup la communication, et il est très à cheval sur des petits détails qui ont trait aux mouvements sur le terrain et à l'organisation du pressing. Il semble très organisé et met beaucoup d'intensité dans son travail. On va tout faire pour s'adapter très vite à ses méthodes ».
Autre joueur à être séduit : Lucas Moura. Le jeune Brésilien a bien régressé sous l'égide de Laurent Blanc et semble revivre avec Emery : « Je me sens très bien. Je suis content. On travaille beaucoup, on travaille très dur. Les entraînements sont bons. Tout le monde est content. Je pense qu'on va arriver très bien pour le début de la saison. L'entraineur travaille beaucoup sur la position de l'équipe, tactiquement, physiquement aussi. Je pense que c'est important de travailler le système tactique de l'équipe. C'était un problème pour moi avant. Maintenant, je pense qu'on va arriver très bien pour le début de la saison. On va être plus organisés sur le terrain à mon avis ».
Un constat cinglant qui témoigne des méthodes radicalement différentes du nouvel entraîneur parisien par rapport à son prédécesseur. Mais c'est évidemment sur le terrain que l'on pourra juger du travail de l'ancien coach de Séville. Contrairement à Blanc, il aime d'ailleurs change de onze de départ. A Valence, il n'avait jamais aligné deux fois la même équipe. Histoire de concerner tout le monde. Concernant son système, il a une affection particulière pour le 4-2-3-1 mais sait s'adapter aux joueurs dont il dispose. Son style ? Un jeu vertical très dynamique avec un pressing agressif. Un peu le contraire du jeu de possession parfois lénifiant produit entre 2013 et 2016. A voir si sa méthode conviendra à ce PSG-là. Dans le discours, en tout cas, la différence de classe est évidente...