Clément, comment appréhendez-vous cette saison 2008-2009 ?
Pour l'instant, on sort juste de la phase de préparation et ça va plutôt bien. L'ambiance à l'entraînement est agréable, je prends mes marques. Tous ensemble, on a réalisé une bonne préparation, en plus il y a de belles recrues, une bonne vie de groupe. Tout les voyants sont au vert, je sens bien cette saison mais le vrai test, c'est contre Monaco le 9 aout.
Quelle est la nature de la blessure que vous avez contractée contre Roulers en match amical ?
C'est juste une béquille mais j'ai préféré être prudent car l'an dernier, j'ai eu le même genre de béquille et j'avais laissé traîner. Ça s'était aggravé et j'avais été éloigné des terrains pendant presque deux mois. Je n'ai pas voulu faire la même erreur alors j'ai pris quelques jours de repos. Mais il n'y a rien de méchant.
L'ambiance semble plus légère et "bon enfant" que les autres années. Le ressentez-vous de l'intérieur ?
Oui. Mais c'est toujours pareil. En début de saison, tout se passe bien, il y a toujours une bonne ambiance, on est content de se retrouver après être parti en vacances. Mais comme je l'ai dit, tout va dépendre de notre entame de championnat. Ce sont les résultats qui entretiennent la vie de groupe. Si on gagne, l'ambiance restera bonne et si on perd, il y aura des tensions qui vont naître et le climat peut devenir pesant. Ce que je n'espère vraiment pas.
Ludovic Giuly a proposé de mettre de la musique dans les vestiaires, cela vous plaît-il ?
Oui. Cela met de l'ambiance et ça permet de nous rapprocher un peu. Mais il n'y a pas encore de cours de danse (sourires).
Comment vous positionnez-vous dans l'équipe. Etes-vous plus proche des "jeunes" ou des "cadres" ?
Younousse (Sankharé), Grandi (N'Goyi), Mamadou (Sakho)... Ils sont vraiment plus jeunes que moi. On a au moins deux ans d'écart, on n'est pas de la même génération, on a peu joué ensemble durant notre formation. Malgré tout, je me considère plus comme un jeune puisque je n'ai que 20 ans. Je ne suis pas un cadre car j'ai encore tout à prouver. Depuis que je suis pro, je n'ai fait qu'une vraie saison complète, il faut que je confirme et que j'enchaîne les bonnes performances.
Les "conflits de génération" dans le vestiaire ont-ils vraiment existé ?
Sincèrement, non. C'était pour faire parler parce que moi, je n'ai rien vu de tout cela. Tout le monde parlait avec tout le monde.
De qui êtes-vous le plus proche dans le groupe ?
Celui avec qui je m'entendais le mieux, c'était Didier Digard. Il a quitté le club mais je ne suis pas quelqu'un de difficile, je parle avec tout le monde. Celui que je connais le mieux, ça reste Youssuf (Mulumbu), on a intégré le centre de formation ensemble quand on avait douze ans, cela fait huit ans qu'on se côtoie, c'est vrai qu'on s'entend bien. J'espère que s'il reste au PSG, c'est pour avoir du temps de jeu parce qu'il le mérite.
Craignez-vous que les arrivées de Claude Makelele et Stéphane Sessegnon réduisent votre temps de jeu ?
A partir du moment où le championnat n'a pas commencé, je ne peux pas trop répondre. En football, tout va très vite donc on verra ce qu'il va se passer. Si ça se trouve je vais jouer et tout va bien se passer. Si je dois être sur le banc, je l'accepterai. A moi de prouver que je peux jouer.
Cet hiver, vous aviez failli être prêté avant de terminer la saison en trombe.
Oui, c'est la preuve qu'il faut toujours y croire, travailler. Une saison, c'est long et difficile. Pour chaque joueur, il y a forcément des moments où tu peux prouver ta valeur. Après, c'est clair que par rapport à ce que j'ai démontré la saison dernière, je serai un peu moins patient que les saisons précédentes mais c'est normal. C'est à moi de montrer que je mérite ma place ici et si je confirme, il n'y a pas de raison pour que je ne joue pas.
Aux côtés d'internationaux, comptez-vous progresser davantage ?
Oui. Ils ont une carrière et une expérience que n'importe quel joueur a envie d'avoir ! Ils ont joué dans de grands clubs, ils ont un palmarès impressionnant, ils ont tous les deux gagné la Ligue des Champions... Je suis obligé d'apprendre à leurs côtés, ce sont des joueurs disponibles, sur lesquels on peut s'appuyer et à qui on peut demander des conseils.
Comme Claude Makelele, vous êtes originaire de Savigny-le-Temple (77). C'est peut-être un signe...
(Sourires) Oui, on a grandi dans la même ville, on n'habitait pas très loin. Quand je jouais à Savigny, Claude commençait à jouer en pro, on parlait beaucoup de lui et notre but, c'était de suivre sa trace. Aujourd'hui, je le retrouve au PSG, ça fait super plaisir mais en même temps, un peu bizarre (sourires) car je le regardais avec des grands yeux quand j'avais 6-7 ans, je voulais faire comme lui et aujourd'hui je me retrouve dans son équipe !
Vous avez grandi à Savigny-le-Temple mais vous êtes né à Sens (89), près d'Auxerre.
Oui, mais j'y suis juste né parce que toute ma famille maternelle habite là-bas et ma mère voulait que je naisse là-bas. Mais j'ai grandi à Savigny-le-Temple, c'est là que j'ai commencé le foot, je suivais mon père sur les terrains de foot quand il arbitrait des matches et dès que j'ai eu le droit, à cinq ans, mon père m'a inscrit en débutant. Puis je suis parti en benjamins au Mee-sur-Seine, club partenaire avec le PSG, j'ai été repéré par Jean-Pierre Dogliani. Je me souviens de mon premier tournoi avec le PSG, c'était avec tous les joueurs recrutés, pour nous permettre de faire connaissance, c'était le "Tournoi Sans Frontières" à Sens, un tournoi pour les "13 ans première année", on avait perdu en finale contre Lyon, aux penalties.
Le club d'Arsenal vous a-t-il vraiment approché cet été ?
Oui, il y a eu des rencontres. Quand tu es pro, tu a toujours envie d'être courtisé par un grand club. C'est flatteur et ça fait vraiment plaisir. C'est le genre de club où tu as envie d'aller direct mais moi, mon envie première, c'était vraiment de confirmer avec Paris. On s'est maintenu sur le fil donc il y avait tout pour que je reste. J'ai connu deux saisons particulièrement difficiles avec le PSG où les deux fois on a joué le maintien donc j'aimerais bien connaître une année où tout se passe bien.
Avez-vous longtemps hésité avant de rempiler avec Paris ?
Pas trop, c'est un choix qui me tient à cœur. Si j'avais quitté Paris, je serais parti avec un sentiment d'inachevé. J'ai fait le choix de rester, c'est quitte un double, ça peut très bien se passer, comme mal se passer. J'ai pris des risques mais je suis très content d'être là.
C'est tout à votre honneur car vous nous aviez confié il y a quelques mois qu'Arsenal était le club étranger que vous préfériez ?
Oui j'ai toujours aimé Arsenal (sourires) même si je pense que je ne suis pas le seul... Aujourd'hui quand tu parles d'Arsenal, ça fait rêver beaucoup de joueurs. Moi y compris. D'être supervisé par Arsène Wenger, un personnage du football français, c'est super flatteur mais comme je l'ai dit, je m'étais mis dans la tête de rester à Paris et j'espère que ce choix va s'avérer payant.
La Premier League est-il un championnat qui vous attire ?
C'est clair que par rapport à mon jeu, je me verrais plus jouer en Angleterre. J'aime bien les ambiances britanniques. En coupe UEFA (2006-2007), on avait découvert un grand public en Irlande (Derry City)... Les spectateurs nous ont applaudis à notre arrivée sur le terrain, ils ont encouragé pendant quatre-vingt-dix minutes. Il n'y a aucun sifflet, aucun jet de projectile. Pendant tout le match ils avaient fait la fête.
En équipe de France Espoirs, que vous inspire le remplacement de René Girard par Erick Mombaerts à la tête de la sélection ?
Apparemment, ça s'est mal fini pour René Girard (Le 29 avril, la FFF a décidé de le remplacer et de lui confier les moins de 18 ans, qu'il a refusés). Pour l'instant, je n'ai connu que lui en Espoirs, il est le premier à m'avoir sélectionné donc je ne peux que le remercier. Maintenant, un nouveau sélectionneur (Erick Mombaerts) a été nommé, on verra comment cela se passe. Je sais qu'il a entraîné le PSG (1987-1988) mais je n'étais pas né ! Je ne le connais pas et de toute façon avec les Espoirs je n'ai pas spécialement d'objectif. Ce qui m'intéresse, c'est ma saison avec Paris.
Votre but contre Epinal (32ème de finale de Coupe de France) le 5 janvier 2008 avait semblé vous libérer pour la seconde partie de saison. Vous venez d'inscrire votre deuxième but en pro contre Roulers, est-ce un bon présage ?
Difficile à dire... (Sourires) Marquer un but, ça fait toujours plaisir car ça booste ta confiance. En plus, ce n'est pas tous les jours que je marque donc je sais en profiter. Même si tu joues moins bien, un but va toujours valoriser ta performance. Petit, j'en rêvais, de marquer des buts pour le PSG ! Je n'ai pas encore marqué en L1 mais cela ne m'empêche pas de dormir ! Ce qui me rassure, c'est que l'année dernière, j'ai su me créer pas mal d'occasions. Je tire davantage au but et c'est ce qui me manquait par rapport à la CFA. Maintenant avec la réussite du "buteur", je pense que cela va finir par me sourire...
4-4-2, 4-2-3-1... Quel système vous convient le mieux ?
Je ne suis pas difficile. Tant que le coach me met sur le terrain, je suis content. Le plus important, c'est de jouer. Même si mon objectif à terme c'est de me fixer un poste et de me perfectionner à ce poste-là.
Où vous sentez-vous le mieux ?
Au poste de milieu relayeur. J'aime faire le lien entre le milieu et l'attaque, un genre de numéro 8.
On sent que la fin de saison dernière vous a éprouvé tant mentalement que physiquement. Vous avez tout donné pour sauver le club.
C'est normal. C'est un club qui me tient beaucoup à cœur donc c'est sur que je ne voulais pas le voir descendre et quand tu regardes la saison dernière, on est vraiment passé tout près de la catastrophe. Au quotidien, ce n'était pas évident.... Le regard des gens n'était pas facile car quelque part, tu sentais que tu les décevais. Les supporters se souviennent du PSG qui jouait le haut du tableau, des Coupes d'Europe et nous, on se retrouvait à jouer le maintien. Tu sentais de la tristesse chez les gens, parfois du dépit et ça fait mal.
A d'Ornano la 34ème journée (Caen-PSG, 3-0), on vous a vu dépité sur le terrain.
C'était compliqué ! On perd 3-0 et en plus on fait un non-match. Juste après, il y a eu les changements de président et au sein de la direction, c'est toujours difficile. Mais je crois que le match qui nous a fait le plus de mal, c'est PSG-Nice (33ème journée, 2-3). On mène 2-1 à cinq minutes de la fin et on perd... J'avais très peur car je pensais que cette défaite allait peser lourd dans la balance mais finalement on s'en sort in extremis. En gagnant la Coupe de France (Lyon-PSG, 1-0), on aurait pu finir sur une bonne note mais on n'a pas de chance. Comme souvent Lyon, même en étant dominé, arrive à se sortir de situations difficiles... C'est devenu une habitude. C'est la réussite des grosses équipes... Mais on n'a rien à regretter, je suis quand même parti en vacances moins content que si on avait gagné !
Quel regard portez-vous sur l'OL ?
C'est un club qui intéresse tout le monde, une machine à gagner, une belle équipe. Maintenant, comme je l'ai répété plusieurs fois, Paris est vraiment le club en France le plus médiatique, on en parle partout. Par exemple, j'ai passé mes vacances en Corse et là-bas, tu as des fans qui supportent le PSG à fond ! Quand tu as passé quelques saisons à Paris, tu as vécu beaucoup de choses. Je ne me vois pas jouer dans un autre club français. Si je pars, ce sera pour l'étranger.
Vous avez pris une nouvelle dimension au sein du club. Comment le vivez-vous ?
Quand c'est dans ce sens-là, on le vit toujours bien ! Ca se passe bien avec les supporters, je les sens derrière moi. Dans le jeu, je me sens bien donc tant mieux. Maintenant, personnellement, la notoriété n'est pas quelque chose que je recherche, je suis quelqu'un d'assez discret. Quand j'entends scander mon nom, c'est flatteur, ça me touche mais ce n'est pas ce que je recherche d'abord en jouant au foot. Mon but, c'est de prendre du plaisir en avec un ballon et d'avoir bons résultats. Le reste, c'est secondaire. Je ne prétends absolument pas devenir l'idole du Parc. J'ai encore beaucoup de travail !
Pourtant, vous incarnez la jeunesse parisienne qui réussit et qui mouille le maillot.
C'est normal de mouiller le maillot pour ton club. Si tu restes toute ta vie dans un club, comme Paulo Maldini au Milan AC, là oui tu peux devenir une idole. Mais au final, tu ne sais pas de quoi ta carrière sera faite. Moi, je reste très prudent avec ça car tu peux très bien dire aux supporters : "Je veux être l'idole du Parc" et au final tu fais quelque chose de pas bien. Ce n'est pas non plus leur rendre service et ce n'est pas quelque chose que je recherche. Mais tout faire pour leur faire plaisir au moment où je suis au PSG, oui, sans problème !
Vous n'avez que vingt ans mais quelle maturité !
(Sourires) A force de côtoyer ce milieu, je vois comment ça se passe, j'apprends. Les deux saisons difficiles qu'on vient de vivre m'ont enrichi. J'ai pris de l'assurance avec les médias et dans l'équipe, je parle plus facilement, je dis ce que je pense, ça plaît ou ça ne plaît pas mais je donne mon avis, j'affirme mes choix. Je reste assez tranquille. Je suis sérieux quand il faut l'être mais j'aime aussi bien avoir des délires des jeunes de mon âge. Je n'ai que 20 ans.
Comment votre famille vit-elle votre nouvelle notoriété ?
Ils sont contents pour moi, pas parce que je suis un peu "connu" mais parce qu'ils me voient heureux. Ils vivent toujours à Savigny-le-Temple mais ils viennent souvent me voir jouer au Parc. Mon père connaît bien le foot et mon frère, qui était étudiant à Besançon a trouvé une école sur Paris ! Toute ma famille est réunie autour de moi, ça a compté dans mon choix pour rester de rester à Paris.
Côté études, vous avez arrêté votre cursus en Terminale S ?
Oui, j'ai raté mon bac il y a deux ans. L'année d'après, je devais le repasser en candidat libre.. Autant j'avais des facilités à l'école, sans non plus être une tête, mais une fois que je me suis mis à travailler tout seul, j'ai plongé, j'étais à fond dans le foot. J'ai fait le choix d'arrêter, ce qui n'a pas plu à mes parents au début. Ils avaient peur pour mon avenir. Mais aujourd'hui, je ne regrette pas car j'ai réussi dans ce que je voulais faire, devenir footballeur professionnel. J'espère surtout que je ne vais pas regretter plus tard de ne pas avoir mon bac. Les personnes de mon entourage me posent souvent la question. Mais moi, pour l'instant, je n'en sais rien du tout.
Vous sentez-vous l'âme d'un capitaine ?
On m'a déjà posé cette question. Pour l'instant, pas trop, car je reste jeune et surtout, je suis de nature discrète. Ma conception du capitaine, c'est quelqu'un qui sait dire les choses au moment où il faut, qui a une bouche ! Moi, ce n'est pas trop mon style, après il y a aussi des joueurs qui sont capitaines par rapport à leur charisme dans le jeu.
Etes-vous toujours engagé dans le programme "Athletes For Transparency" destiné à la lutte anti-dopage ?
J'ai arrêté car les contrôles répétés devenaient trop contraignants. Régulièrement dans la saison, on m'appelait pour me demander de faire des prises de sang. Les résultats étaient rendus publics sur un site et le but, c'était de montrer que n'importe quel sportif de haut niveau pouvait pratiquer son sport sans être dopé. Les responsables du programme cherchaient un jeune qui montait et j'étais le seul footballeur à le faire. Même si j'ai arrêté, je continue de soutenir cette initiative, la conception du projet est vraiment intéressante.
Propos recueillis par Emilie Pilet
Interview parue dans "Le Foot Paris" (n°48, aout 2008)